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Rrose Selavy est une cousine à moi
18 mai 2014

Madeleines de Proust musicales...

Les mains dans l'eau de vaisselle, la mousse blanche et son parfum de fruit chimique, je frotte les assiettes en pensant à autre chose. Mon téléphone portable est posé sur la machine à laver, il diffuse de la musique, Ma musique. J'entends les premières notes d'une chanson des années 80, ma playlist en est truffée (encore cette histoire de nostalgie tout ça tout ça...). "Une autre histoire" de Gérard Blanc. Dans ma tête défilent les images du clip. Gérard Blanc dans le désert, avec une barbe de dix jours, aventurier, sauvage, animal presque. De quoi faire impression sur la petite fille de 9 ans que j'étais alors. Même si, c'est sûr, je ne voyais pas ce clip avec les mêmes yeux qu'aujourd'hui. Je me mets à fredonner, presque inconsciemment, cet air que j'aime. Et d'un coup, d'un seul, une image me vient en tête. Avec ma vaisselle, et ma petite musique datée, je me fais l'effet d'une petite mamie qui a sorti son poste de radio et y a fiché sa vieille cassette de Tino Rossi.

J'ai 35 ans et il y a, dans mon téléphone portable, plus de vieilles chansons que de tubes actuels (d'ailleurs est-ce qu'on dit encore "tube"?). Dans ma playlist se côtoient du super kitch du genre "When the rain begins to fall" et du rock français comme le "Tostaky" de Noir Désir. Et ça doit être un sacré bordel là-dedans. J'imagine bien la Pia Zadora et son costume psychédélique faisant un pogo avec Bertrand Cantat (sans mauvais esprit bien sûr), Steven Tyler en train de reluquer l'appétissante Katy Perry et ses costumes affriolants.

Autant certaines chansons y sont un peu par hasard, parce que je les ai entendu dans une boutique ou un resturant, qu'elles m'ont plues, et que merci Shazam. Autant certaines résonnent en moi car elles me rappellent une période de ma vie, voir carrément un instant. Je me souviens, par exemple, d'un de mes premiers disques vinyls que je mettais dans un mange-disque orange. C'était un titre des années 80, "Aviateur" de Véronique Jeannot. La nature m'a dotée d'une mémoire exceptionnelle en ce qui concerne les paroles de chansons. Alors que je suis touchée du syndrôme Dorie (dans Némo, les jeunes parents qui lisent comprendront), aucune mémoire immédiate, quand il s'agit de retrouver où j'ai posé mes clefs (d'autant plus que le territoire de recherche est étendu - il se peut que je les aient posées dans mon frigo). Bref... Avec ma soeur jumelle, experte en blind-test, capable de retrouver n'importe quel titre grâce aux 3 premières notes, on forme une équipe du tonnerre. Du coup, je peux chanter "Aviateur" d'un bout à l'autre mais aussi une tripotée de tubes de cette époque.

Mais c'est un fait: les vieilles chansons sont de vraies madeleines de Proust. Qui n'a jamais souri en entendant une chanson? Ou au contraire qui n'a jamais ressenti comme une boule d'angoisse au fond de la gorge? Qui n'a jamais été transporté, par quelques accords, en d'autres temps, d'autres lieux? Quand j'entend "Black Hole Sun" de Soundgarden, je suis d'un coup projetée dans un petit village des Pyrénées, le chaud soleil du mois d'août est au zénith, les copains font des tours sur leurs mobylettes pétaradantes, on s'est tous rassemblés devant l'église, sur la place, et on se raconte des conneries. Quand c'est un vieux single des années 80, François Feldman, Luna Parker, Pacifique... je nous vois, mes soeurs et moi, agglutinées devant la télé, toutes en pyjama, guettant le début du Top 50 comme le retour du Messie. Quand j'entends un vieux tube d'Offspring, je me revoie, lycéenne, assise dans le bus, écouteurs dans les oreilles, les yeux dans le vague. Quand passe "Killing me softly" par les Fugees, ce sont des vacances au camping à côté de Perpignan, la tramontane (que j'ai toujours appelé tramontagne) qui emporte le sable et vous fouette le visage, les jambes et tout le reste; et une invasion de coccinelle sur la plage cette année-là, 1996 il me semble. Quand j'entends une vieille chanson d'Eros Ramazotti ou l'inoubliable "Me and Mrs Jones" de Billy Paul, me voilà à bord d'une 309 GTI, le chat miaulant à l'arrière et le moteur vrombissant à l'avant, traversant la France vers la promesse de doux moments ensoleillés.

Avec mon homme, on n'a pas de chanson fétiche, une chanson sur laquelle on aurait dansé, sur laquelle on se serait embrassé, mais je me souviens bien de cette chanson qui passait tout le temps sur les ondes ou à la télé "Say what you want" du groupe Texas. La jolie Sharleen Spiteri et sa voix envoutante, vêtue d'un tee-shirt bleu électrique, clonée une douzaine d'exemplaires, la guitare à la main; un clip pas exceptionnel mais dont je me souviens avec nostalgie. De même je me souviens de cette cassette de Sting qu'il glissait dans le vieux poste de la première voiture qu'il a conduit.

Et si certaines chansons vous rappelle des moments précieux, certaines vous rappellent aussi des êtres précieux. Aussi je n'écouterai plus jamais Cabrel sans que mon coeur ne se serre.

Et vous? Quelle chanson vous transporte? Vous remue les tripes?

top-50

 

 

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Commentaires
T
il y en a des tas...je suis comme toi, incapable de me rappeler où j'ai mis mes clefs, mais capable de te dire ce que je faisais en aout 1994, et quelle chanson passait sur les ondes....<br /> <br /> Il n'y a pas longtemps, j'ai entendu un vieux tube de Take That, 'Back for good' (hum hum....no comment please) et ça m'a remué les tripes, parce qu'en 1995, j'étais follement amoureuse d'un jeune allemand, et que nous avions dansé un slow sur cette chanson (c'est d'ailleurs le seul contact physique que nous ayons eu!). J'ai écouté la chanson en boucle l'été qui a suivi, en pleurant et regardant des photos de ce type. Et voilà, je l'ai entendu je ne sais où, je n'avais pas oublié les paroles, et mon coeur s'est serré....
Rrose Selavy est une cousine à moi
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