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Rrose Selavy est une cousine à moi
26 mars 2014

"Vous chantiez? j'en suis fort aise..." ou de la difficulté de chercher un emploi...

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Aujourd'hui, j'avais envie de vous parler de ma recherche d'emploi. Mais il y a tant à en dire, ou peut-être est-ce le contraire?, il n'y a pas grand chose à en dire, je ne sais pas, je ne sais plus.

Lorsque j'ai commencé des études d'histoire de l'art, après un bac L option Arts Plastiques, je savais pertinament que je m'engageais dans une voie compliquée, voir sans issue. Mais on n'est pas sérieux quand on a 18 ans. Et j'aimais réellement étudier l'histoire de l'art. Entrer dans un amphi, plongé dans le noir, et voir toutes ces merveilles défiler sur des diapositives projetées au mur: des sculptures antiques ou plus modernes dont nos professeurs décrivaient les courbes comme s'il s'agissait de leurs amantes ; des tableaux de toutes les époques: le réalisme et les couleurs profondes des premières huiles sur toile hollandaises, la douceur des fresques italiennes et les traits charmants des anges, les bouquets des natures mortes qui disent la vanité de la vie et qu'on a pourtant envie de cueillir depuis l'écran ou leurs fruits appétissants qu'on voudrait mordre à pleines dents, les clairs-obscurs saisissants de beauté du Caravage, la grâce des danseuses de Degas ou les touches de couleurs vibrantes d'un tableau de Signac. Tout! J'aimais tout! Même le pointilleux vocabulaire utilisé pour codifier l'architecture et ses éléments, qu'elle soit antique ou médiévale.

J'aimais imaginer les querelles entre Michel-Ange et le pape JulesII à propos du plafond de la Chapelle Sixtine. J'aimais rêver à la Bruges du XVème siècle, à la Florence du XVIème siècle et au Paris de la fin du XIXème et début du XXème. Bref j'étais mordue! J'avançais bille en tête, ne me préoccupant pas de ce que je ferai une fois mon diplôme en poche. J'en prenais plein les yeux, je nourrissais mon âme et mon coeur. 

Oui mais voilà... Après avoir complété une maîtrise d'histoire de l'art par un 3ème cycle de médiation culturelle, qu'en était-il maintenant? Maintenant que la crise était passée par là, maintenant que le budget de la culture se voyait réduit à peau de chagrin pour les ménages français, puisqu'en temps de crise, et je ne blâme personne, on songe en premier lieu à remplir son assiette plutôt qu'à fréquenter les musées. Et qu'en était-il de mes choix d'études indépendants de la réalité du marché professionnel? "Vous avez chanté tout l'été?" dit la cigale à la fourmi "Et bien dansez maintenant"...

Il m'a quand même été donné de travailler dans le Livre Ancien pendant deux ans, près de Drouot, là où se côtoient marchands d'art, antiquaires, camelots, collectionneurs et curieux. Malheureusement, le monde du travail est aussi et d'abord un monde de compromis que je n'étais pas prête à faire à l'époque. Or la différence de traitement entre employés (je n'étais même pas concernée mais ce n'est pas mon style de fermer les yeux sur une injustice) et la mauvaise ambiance qui en découlait, ont eu raison de moi et j'ai quitté le poste que j'occupais. Pour me retrouver à vivre une longue mais précaire période à travailler dans une sorte de comité d'entreprise où mes relations avec mes collègues étaient bien plus épanouissantes. Hélas on ne peut pas dire la même chose des tâches qui m'étaient dévolues. Une satisfaction quand même: c'était un travail avec une portée sociale importante. Attribuer une bourse d'étude à des familles au budget serré, ou aider ces mêmes familles à partir en vacances, voilà quelque chose de réconfortant, quelque chose qui m'empêchait de me rendre au travail à reculons. Malgré tout, c'était un travail répétitif et pas forcément très stimulant intellectuellement parlant.

Entre-temps, je ne suis plus "une" mais "trois". Comprendre: je dois faire aussi en fonction de deux petits êtres Ô combien attachants mais avec lesquels il me faut composer. Et oui, pour Super Maman: "Un grand pouvoir implique des grandes responsabilités."

Aujourd'hui, ce n'est pas facile pour moi. Si je postule dans la Culture, il me manque de l'expérience sur le terrain (même si j'ai fait divers stages à la FIAC, dans une revue d'art ou au musée Bourdelle par exemple, j'ai écrit des articles...). Si je postule pour des boulots où l'on ne demande que le BAC, je suis trop diplômée et je vois dans les yeux du recruteur la conviction que je mettrai les voiles dès que j'aurai trouvé de plus verts pâturages. Si je postule pour un emploi en rapport avec mes autres hobbies, je suis trop naîve, je ne sais pas vendre, trop timide, trop rougissante (et oui: me demander de garder une couleur normale en entretien ça aurait été comme demander à Mickaël Jackson de choisir entre le noir et le blanc...), trop ceci, pas assez cela... Beaucoup de gens m'encouragent à créer mon activité... Mais en réalité, je n'ai aucune idée de ce pour quoi je suis faite, j'ai tellement peur d'être médiocre que je préfère ne rien faire plutôt que de mal faire! Je sais bien que ce n'est pas une solution... Mais ce n'est pas mon dernier mot! En septembre, ma petite puce fait son entrée à l'école. Et il est temps que je prenne sur moi et que je réintègre le monde du travail, timide ou pas, rougissante ou pas...

 

 

[ En illustration de ce billet, un de mes tableaux préférés, Les raboteurs de parquet de Gustave Caillebotte, 1875 ]

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Commentaires
T
je te souhaite de très vite trouver un boulot qui pourra t'épanouir!
A
Aaargh j'aime ce tableau sans trop savoir pourquoi, une lumière, une émission radio... Je ne sais. Mais tant merci de me l'avoir remis sous le nez, ça sent bon la culture sous mon neurone.
Rrose Selavy est une cousine à moi
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